La subversion par le rire
J’en ai d’abord été convaincue théoriquement, lorsque j’ai lu Le gai savoir de l’acteur de Dario Fo, belle démonstration de la force redoutable et salutaire du rire : « L’éclat de rire révèle le sens critique, la fantaisie, l’intelligence, le refus de tout fanatisme (…) C’est notre devoir, ou si vous préférez notre tâche professionnelle d’auteurs, metteurs en scène, gens de théâtre, de parler de la réalité en brisant les schémas attendus, par l’imagination, l’ironie, le cynisme de la raison« . J’en suis aujourd’hui convaincue intimement, concrètement. Et c’est là, attention ! que j’attaque mon plaidoyer pour le rire.
La noblesse de l’éclat de rire
La subversion par le rire est nécessaire, parce que là où la lutte obstinée s’épuise et n’obtient rien, le rire réussit à dissoudre les pires résistances, à amollir les pires dictatures (sur ce sujet, je recommande vivement le formidable documentaire La comédie aux 4 coins du monde, de Larry Charles, sur Netflix). La subversion par le rire est la seule qui vaille, parce que, aux critiques virulentes et revanchardes, aux leçons de morale assénées d’un ton supérieur, je préfère la mise en lumière par la finesse, la fantaisie, et la noblesse d’un éclat de rire : il y a de la noblesse chez celui qui oublie ses propres soucis et souffrances, pour te faire oublier les tiens dans le rire, l’espace d’un moment salvateur et précieux.
Le joyeux parti d’en rire
La subversion par le rire est la plus adéquate à notre condition humaine, parce que, quand on voit mourir un être cher, on éprouve dans sa chair la fragilité précieuse et fugace de la vie, et on voit bien qu’au fond, rien de tout cela n’est sérieux, n’est-ce-pas ? Alors, je choisis la légèreté. L’élégance, la grâce et la force de la légèreté. Alors, je prends le parti d’en rire. Le parti joyeux, bienfaisant, rassembleur et lumineux d’en rire.